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Pour nourrir 9,7 milliards d’habitants en 2050

La sécurité alimentaire en débat en… Suisse

Publié le 15/01/2018 - 16:42
Hans Dreyer, directeur de la FAO, plaide pour une utilisation plus large des plantes comestibles. Photo : Antoine Hervé

Une quarantaine de journalistes agricoles internationaux ont assisté à la première « votation » suisse sur la sécurité alimentaire fin septembre. Le débat concerne aussi l’Afrique, dont la population devrait doubler d’ici 2050.

 

Les Suisses sont incorrigibles ! Ils votent pour tout. Y compris pour la sécurité alimentaire. Le 24 septembre dernier, 78,7 % des Helvètes ont dit oui à une initiative de l’Union des paysans suisses qui demande à compléter la Constitution du pays par un article sur la sécurité des aliments. Sécurité de la production à l’assiette. On comprend d’ailleurs mal que plus de 20 % des personnes sondées aient pu dire non à une telle requête…

Le texte prône, entre autres, une agriculture propre, sans organismes génétiquement modifiés et des mesures pour réduire le pouvoir de la grande distribution dans la fixation des prix des produits. Un dernier débat qui pourrait bientôt s’inviter en Afrique avec l’arrivée des grands distributeurs, tel Carrefour en Côte d’Ivoire.

Au-delà de cette « votation », c’est tout un débat autour des notions de qualité et de quantité de nourriture nécessaire à une planète qui comptera près de dix milliards d’habitants en 2050 (9,77 milliards exactement selon l’Onu) qui a cours. La démographie la plus forte est d’ailleurs à mettre à l’actif de l’Afrique qui possède aussi la moyenne d’âge la plus faible.

La sécurité alimentaire, cela consiste à produire sain et propre, sans trop de pesticides, en respectant la terre, l’eau, l’air, le paysan et le consommateur. L’agriculture biologique est-elle la seule voie pour arriver à cela ? Non. De nombreux concepts existent, comme l’agriculture durable, éco-responsable ou « écologiquement intensive ». Autant de termes un peu pompeux qui signifient simplement une agriculture raisonnée dans laquelle l’emploi des désherbants, fongicides ou insecticides ne doit être qu’un dernier recours, à usage modéré, quand l’agronomie pure et simple ne suffit plus : travail du sol adéquat, bonnes rotation et observation des cultures, engrais verts, matières organiques…

La Suisse est le pays  du fromage et des pâturages, comme ici à Entlebuch, au centre du pays, zone protégée par l’Unesco. Photo : Antoine Hervé

 

Respecter le sol, cela veut dire aussi ne pas le massacrer avec des tracteurs toujours plus lourds et plus puissants. Des engins qui compactent la faune et la flore. Les nouvelles technologies peuvent être, en ce sens, une aide précieuse à la protection du sol. Les logiciels, drones et autres nouveaux outils aideront à traiter et à fertiliser les champs avec précision. Et non pas à asperger une parcelle de façon homogène alors que l’azote ne manque pas partout et que la maladie ne sévit pas à l’identique.

 

Des aliments sains pour tous

En votant oui à la votation, les Suisses ont aussi plébiscité une agriculture indigène. C’est-à-dire une production locale. « On sait d’où viennent les aliments », disent souvent les consommateurs qui veulent se rassurer. Ces derniers rechignent à acheter des produits qui viennent du bout du monde. Là encore, les Africains savent de quoi il retourne. Ils reçoivent du poulet congelé français, du soja brésilien, du riz asiatique… Autant de produits qu’ils pourraient cultiver eux-mêmes pour moins cher et de meilleure qualité.

La concentration des aliments est aussi en cause. « Il faut promouvoir une plus large gamme de cultures et de variétés, a plaidé Hans Dryer, le directeur de la FAO, devant les journalistes du Press Tour à Lucerne (voir encadré). Sur les 391 000 plantes de la planète, dont 27 600 comestibles, seules 168 sont réellement cultivées et 9 essentielles (riz, maïs, blé…). »

La sécurité alimentaire concerne tout le monde. Avec la recrudescence des cancers, la sensibilisation grandissante à la pollution et le changement climatique en cours, les différents acteurs de la chaîne alimentaire doivent plus que jamais prendre leurs responsabilités pour proposer des aliments sains à tous les habitants de la planète, quels que soient leur race, leur couleur ou leur pouvoir d’achat. En ce sens, la votation suisse sur la sécurité alimentaire, bien qu’au résultat attendu, est une initiative heureuse pour la Suisse et pour l’avenir de la planète.

 

Une quarantaine de journalistes agricoles internationaux en congrès à Entlebuch
Deux journalistes sud-africains du Farmer’s Weekly South Afric, et le rédacteur en chef d’Afrique Agriculture, faisaient partie de la quarantaine de journalistes du monde entier invités au Press Tour « Food security, Free trade and sustainability » organisé du 22 au 25 septembre dans le canton de Lucerne, en Suisse, par la fédération internationale des journalistes agricoles, à l’occasion de la votation helvète sur la sécurité alimentaire. 
Ils ont pu écouter des experts, mais aussi visiter des exploitants (bovins, moutons, bio…), la plus grande fromagerie du pays (gruyère, emmental…) et assister à la spectaculaire transhumance des vaches qui descendent des alpages pour rejoindre leurs étables. Du beau spectacle en somme !

 

 

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